Les Écritures Bougées, le festival #2 (1)

9.6.2017
10.6.2017
Librairie À Balzac À Rodin, Paris
Parler c’est déjà faire quelque chose
Les écritures bougées est un micro Festival de Performances focalisé sur les rapports entre corps et texte dans la performance qui se déroulera sur trois dates au printemps 2017.
Comment bouge t-on un texte ? Pourquoi parle t-on en bougeant ? Pourquoi parle t-on immobile ? De quel type d’immobilité s’agit-il ? De quel type de mouvement ? De quel type de mots en fonction de quel mouvement ?
Ce festival présente le travail de différents écrivains, performeurs, artistes ou chorégraphes qui questionnent au sein de leur travail les rapports entre corps et écriture, corps et textualité.
Depuis les années 2000, on remarque aussi bien dans des spectacles de danse contemporaine que de théâtre contemporain ou encore et avant tout dans les nouvelles formes de performances (lecture-performance, conférence-performances, performance-actions…), que lorsqu'il parle, l'acteur, le danseur ou le performeur "bouge le texte" d'une tout autre manière que les acteurs peuvent le faire dans les formes de théâtre plus conventionnelle. C’est peut-être l’influence de l’art contemporain au travers de la performance, mais sans doute aussi l’influence des mouvements comme le futurisme et le dadaïsme, ou encore Fluxus, qui ont décloisonné les arts et ont conduit à inventer un nouveau corps pour dire/crier/chanter/parler le texte. Le changement de rapports texte/corps crée d'autres relations entre parole et mouvement : relations de symétrie, de superposition, de calque, d’opposition, de contraste, de rythme, de tonalité… Il n’y a plus d’illustration de l’un par rapport à l’autre (mouvements qui illustrent le texte) mais une autonomie de chaque médium ou un renversement des rapports hiérarchiques habituels (le texte décrit le mouvement). Le mouvement dans certains cas, relève parfois plus de l'action que du mouvement chorégraphique, parfois encore il est libre (non-écrit), indescriptible, rythmique, musical ou c’est d’autre fois la parole qui est action, rythme, musique… On peut citer quelques chorégraphes, écrivains ou metteurs en scène qui cherchent à repenser ces rapports entre corps et texte au travers de certaines de leur création comme Noé Soulier dans Mouvement sur mouvement ou encore Fanny de Chaillé avec Le Groupe, Jonathan Capdeville avec Saga, le travail de Grand Magasin et d’Yves-Noël Genod (sur des modes très différents), Joris Lacoste dans son travail sur l’Encyclopédie de la parole, Tiago Rodriguez lorsqu’il travaille avec deux chorégraphes dans Antoine et Céopâtre, Daniel Jeanneteau dans Mon corps parle tout seul, les performances de Sabine Macher, Frédéric Danos, Céline Ahond, Barbara Manzetti, Fabrice Reymond...
Dans toutes ces pièces ou chez tous ces artistes on reconnait une tentative de dissociation ou d’association repensée, entre corps et texte ouvrant sur de nouvelles problématiques, de nouvelles possibilités d’articuler, de repenser leur rapport. Dans ces pièces, la voix et le mouvement signifient conjointement ou parallèlement, (l’un parfois devenant l’outil de l’autre) et proposent deux types d’imaginaires et d’images, tissant différents réseaux de sens qui se recoupent ou s’excluent. Dans le cadre des Ecritures bougées, il s’agira d’explorer au travers de différentes performances d’artistes ces divers modes de mise en relation texte et corps.
En partant de ces réflexions le micro festival Ecritures bougées, invite sur trois dates des artistes, chorégraphes, écrivains et performeurs à présenter des micro-formes, c’est-à-dire des performances de maximum 15 minutes, comme une forme condensée de leur travail ou une proposition courte, une idée, un état de leur réflexion sur les rapports entre texte/corps dans une performance.




Eoliennes oubliées et poésie

Les écrivains sont des éoliennes qui moulinent silencieusement la nuit.

En partant du Moulin de Don Joël Hubaut de la Mancha, (installation galerie Lara Vincy, 1985) de Joël Hubaut qui mouline la parole,
et de l’événement Hiatus-Bobosse-Club organisé en janvier 2003 par Joël Hubaut pour fêter l’anniversaire de l’art de Robert Filliou,
En repensant à mes propres retrouvailles avec les éoliennes, surgissant en plein milieu de la Beauce durant une nuit d’août 2016,
En évoquant l’expérience Polyphonix créé en 1979 par François Dufrêne, Christian Descamps et Jean-Jacques Lebel qui mêlait poésie sonore, performance, vidéo et musique,
J’ai voulu mettre en place un cycle de rencontres avec des écrivains, des artistes écrivant et différents publics pour interroger la plasticité de l’écriture.
« Tu es un moulin à parole. » Peut-on dire cela d’un écrivain ? Oui, quand on sort le moulin intérieur de l’écrivain, c’est-à-dire lorsque le texte est dit, énoncé à haute voix par lui-même.
Est-ce que ça tourne en rond ? Non.
Les moulins, les éoliennes c’est le brassage des vents. Des pales qui emportent tout dans leur rotation, moustiques, idées, pluie, souffles, gaz, micro-particules, sons, larmes, vibrations…
Ça mêle une infinité de voix en un souffle. L’écrivain est un brasseur.
Faire émerger cette possibilité d’entendre la voix de l’écrivain, de l’artiste, hors du contexte d’une lecture à l’occasion de la sortie d’un livre, de la faire surgir au milieu d’autres écrivains, d’autres personnes, c’est ce que j’envisage de mettre en place grâce à ces rencontres.
Les possibilités vivantes plastiques de l’écriture sont infinies, j’en suis convaincue.
Le hiatus dans le mot éolienne, cette rencontre entre deux voyelles, entre deux sons, crée en quelque sorte, un appel d’air et en même temps une distance marquant une différence radicale.
Ces soirées se veulent emplies de hiatus, de sons, de rire et de tumulte.
Un moulin en kit où l’on voit défiler des pales de 23 à 45 mètres de long, voire 60 mètres et plus et des bruits de mots, des voyelles et des consonnes pour remplir l’air de sons en mouvement.
Le lieu, la voix et la vision seront convoqués dedans et dehors.
Tous les lieux oubliés ou en mémoire, réels ou translucides, les maisons, les champs, les caveaux, les châteaux, les yourts, les précipices, les grottes, les déserts, les auberges, les souterrains, les observatoires…
La voix du lieu, comme le chant des éoliennes, qui vibre jusqu’à nous, viendra peut-être jusqu’à la librairie nous troubler…

Télécharger le journal La Nuit Fulgurante #1
No items found.
No items found.

Qu'on enlève, qu'on déchire pour manger

Barbara Manzetti

Mon moteur broute au démarrage !

Arnaud Labelle-Rojoux

Mon corps a encore craqué

Yoann Thommerel

Écoute

Olivier Normand

J’ai mis du temps à me bouger pour écrire

Maya Boquet

Extracosmique, no stress

Antoine Boute

Chiens ronds

Frédéric Danos

Poëmmm müsquéééé

Joël Hubaut
Biographies des artistes

Barbara Manzetti

Après une première réalisation chorégraphique pour la scène, qui reçoit le prix de la SACD belge en 1996, Barbara Manzetti s’éloigne rapidement des cadres de création usuels pour des territoires d’investigations plus immédiats en milieu urbain. Dernière parution, Épouser. Stephen. King. sort en 2013, aux éditions Les Petis matins.

Arnaud Labelle-Rojoux

Arnaud Labelle-Rojoux, s’est d'abord fait connaître dans le circuit de la performance dont il est devenu l'historien avec son livre L'Acte pour l'art (Editeurs Evidant, 1988 ; nouvelle édition, Al Dante, 2004). Il a depuis publié une dizaine d’essais En 2020 a été réédité par Les Presses du Réel : Récits de la vie de Michelangelo Merisi dit Le Caravage. Il expose régulièrement depuis 2003 à la Galerie Loevenbruck qui le représente à Paris (en 2017 : En affinité(s) : Apple Shrine / Allan Kaprow / Arnaud Labelle-Rojoux). Il a par ailleurs, entre autre, participé aux expositions Notre Histoire, Palais de Tokyo, 2006 ; La Force de l'art 02, Grand Palais, Paris, 2009 ; Une forme pour toute action, Le Printemps de septembre, Toulouse, 2010 ; Les Maîtres du désordre, Musée du quai Branly, 2012 ; Le Surréalisme et l’objet, Centre Georges Pompidou, 2013.

Yoann Thommerel

Engagé dans le champ de la performance et de la poésie-action, il met en jeu ses textes dans des formes hybrides convoquant aussi bien les arts vivants que visuels. Depuis la parution de Trafic aux Petits matins, créé à la Colline par Daniel Jeanneteau et Marie Christine Soma, ses textes sont régulièrement mis en scène au théâtre. Il a créé avec Sonia Chiambretto le Groupe d’information sur les ghettos (g.i.g) qui rassemble, partout où il s’implante, habitants, artistes et chercheurs, tous impliqués dans la création de protocoles d’enquête : écriture de questionnaires, diffusion, récolte de données, traitement. Le fonds documentaire du g.i.g est régulièrement convoqué pour créer des espaces fictionnels poétiques et frontalement politiques interrogeant les mécanismes d’exclusion et de repli : publications, installations, vidéos, performances…
Derniers livres parus : Mon Corps n’obéit plus (Nous, 2017), Questionnaire élémentaire (Les Laboratoires d’Aubervilliers / g.i.g, 2018), Bandes Parallèles (Les Solitaires intempestifs, 2018).

Olivier Normand

Maya Boquet

Réalisatrice sonore, auteure, dramaturge. Dans ses propres projets ainsi que dans divers collaborations, elle collecte des récits, des parcours de vie, des paysages sonores, qu’elle aborde différemment selon le médium adopté, radio, théâtre ou écriture, tout en explorant le large continuum entre fiction et documentaire. Elle a notamment adapté des fictions radiophoniques pour France Culture, co-fondé le groupe radiophonique franco-belge Radio Femmes Fatales, et co-écrit Les Spécialistes avec Émilie Rousset.

Antoine Boute

Écrivain, poète sonore, essayiste, organisateur d’événements, il explore les impacts entre corps, langue et voix selon divers supports et moyens (papier, internet, scène) et aime collaborer avec d’autres auteurs et artistes. Son œuvre est un jeu constamment reformulé, absurde, inquiétant et amusant, auquel il convie qui souhaite y participer. Dernières parutions, Opérations biohardcores, illustrations de Chloé Schuiten, Les Petits matins, Paris, 2017.

Frédéric Danos

Décédé le 8 août dernier, le biographe de Frédéric Danos n’a laissé aucun document.

Joël Hubaut

Mixant toutes ces sources hétéroclites, il oriente son activité vers un mixage hybride et monstrueux qu’il qualifie avec humour de « Pest-Moderne ». Il crée à partir de 1970 ses premiers signes « d’écriture épidémik » qui envahissent tous les supports, objets-corps humains-véhicules-sites, etc. développant un processus rhizomique pluridisciplinaire et intermédia sous forme d’installations et de manœuvres. Il crée et anime Nouveaux Mixages de 1978 à 1985. Il réalise des installations, des dessins, des peintures et objets divers, il est paradoxalement d’abord connu pour ses performances et ses textes poétiques. Plaçant l’épidémie et la contamination (acte prémonitoire) au centre d’une réflexion sur l’art et la société, son recours à la parodie et à la dérision peut alors prendre une dimension véritablement tragique. La destabilisation engendrée par la polyvalence de son activité dispersée, l’énergie décalée et la pratique de l’absurde qu’il étend à toute sorte de manifestations inattendued dans le système de l’art contemporain ou ailleurs témoignent de sa singularité. Il expose et performe en France et à l’étranger.