Les Écritures Bougées, le festival #4 (1)

7.7.2017
Les Grands Voisins, Paris
Penser en bougeant, bouger en parlant
Les écritures bougées est un micro Festival de Performances focalisé sur les rapports entre corps et texte dans la performance qui se déroulera sur trois dates au printemps 2017.
Comment bouge t-on un texte ? Pourquoi parle t-on en bougeant ? Pourquoi parle t-on immobile ? De quel type d’immobilité s’agit-il ? De quel type de mouvement ? De quel type de mots en fonction de quel mouvement ?
Ce festival présente le travail de différents écrivains, performeurs, artistes ou chorégraphes qui questionnent au sein de leur travail les rapports entre corps et écriture, corps et textualité.
Depuis les années 2000, on remarque aussi bien dans des spectacles de danse contemporaine que de théâtre contemporain ou encore et avant tout dans les nouvelles formes de performances (lecture-performance, conférence-performances, performance-actions…), que lorsqu'il parle, l'acteur, le danseur ou le performeur "bouge le texte" d'une tout autre manière que les acteurs peuvent le faire dans les formes de théâtre plus conventionnelle. C’est peut-être l’influence de l’art contemporain au travers de la performance, mais sans doute aussi l’influence des mouvements comme le futurisme et le dadaïsme, ou encore Fluxus, qui ont décloisonné les arts et ont conduit à inventer un nouveau corps pour dire/crier/chanter/parler le texte. Le changement de rapports texte/corps crée d'autres relations entre parole et mouvement : relations de symétrie, de superposition, de calque, d’opposition, de contraste, de rythme, de tonalité… Il n’y a plus d’illustration de l’un par rapport à l’autre (mouvements qui illustrent le texte) mais une autonomie de chaque médium ou un renversement des rapports hiérarchiques habituels (le texte décrit le mouvement). Le mouvement dans certains cas, relève parfois plus de l'action que du mouvement chorégraphique, parfois encore il est libre (non-écrit), indescriptible, rythmique, musical ou c’est d’autre fois la parole qui est action, rythme, musique… On peut citer quelques chorégraphes, écrivains ou metteurs en scène qui cherchent à repenser ces rapports entre corps et texte au travers de certaines de leur création comme Noé Soulier dans Mouvement sur mouvement ou encore Fanny de Chaillé avec Le Groupe, Jonathan Capdeville avec Saga, le travail de Grand Magasin et d’Yves-Noël Genod (sur des modes très différents), Joris Lacoste dans son travail sur l’Encyclopédie de la parole, Tiago Rodriguez lorsqu’il travaille avec deux chorégraphes dans Antoine et Céopâtre, Daniel Jeanneteau dans Mon corps parle tout seul, les performances de Sabine Macher, Frédéric Danos, Céline Ahond, Barbara Manzetti, Fabrice Reymond...
Dans toutes ces pièces ou chez tous ces artistes on reconnait une tentative de dissociation ou d’association repensée, entre corps et texte ouvrant sur de nouvelles problématiques, de nouvelles possibilités d’articuler, de repenser leur rapport. Dans ces pièces, la voix et le mouvement signifient conjointement ou parallèlement, (l’un parfois devenant l’outil de l’autre) et proposent deux types d’imaginaires et d’images, tissant différents réseaux de sens qui se recoupent ou s’excluent. Dans le cadre des Ecritures bougées, il s’agira d’explorer au travers de différentes performances d’artistes ces divers modes de mise en relation texte et corps.
En partant de ces réflexions le micro festival Ecritures bougées, invite sur trois dates des artistes, chorégraphes, écrivains et performeurs à présenter des micro-formes, c’est-à-dire des performances de maximum 15 minutes, comme une forme condensée de leur travail ou une proposition courte, une idée, un état de leur réflexion sur les rapports entre texte/corps dans une performance.




Eoliennes oubliées et poésie

Les écrivains sont des éoliennes qui moulinent silencieusement la nuit.

En partant du Moulin de Don Joël Hubaut de la Mancha, (installation galerie Lara Vincy, 1985) de Joël Hubaut qui mouline la parole,
et de l’événement Hiatus-Bobosse-Club organisé en janvier 2003 par Joël Hubaut pour fêter l’anniversaire de l’art de Robert Filliou,
En repensant à mes propres retrouvailles avec les éoliennes, surgissant en plein milieu de la Beauce durant une nuit d’août 2016,
En évoquant l’expérience Polyphonix créé en 1979 par François Dufrêne, Christian Descamps et Jean-Jacques Lebel qui mêlait poésie sonore, performance, vidéo et musique,
J’ai voulu mettre en place un cycle de rencontres avec des écrivains, des artistes écrivant et différents publics pour interroger la plasticité de l’écriture.
« Tu es un moulin à parole. » Peut-on dire cela d’un écrivain ? Oui, quand on sort le moulin intérieur de l’écrivain, c’est-à-dire lorsque le texte est dit, énoncé à haute voix par lui-même.
Est-ce que ça tourne en rond ? Non.
Les moulins, les éoliennes c’est le brassage des vents. Des pales qui emportent tout dans leur rotation, moustiques, idées, pluie, souffles, gaz, micro-particules, sons, larmes, vibrations…
Ça mêle une infinité de voix en un souffle. L’écrivain est un brasseur.
Faire émerger cette possibilité d’entendre la voix de l’écrivain, de l’artiste, hors du contexte d’une lecture à l’occasion de la sortie d’un livre, de la faire surgir au milieu d’autres écrivains, d’autres personnes, c’est ce que j’envisage de mettre en place grâce à ces rencontres.
Les possibilités vivantes plastiques de l’écriture sont infinies, j’en suis convaincue.
Le hiatus dans le mot éolienne, cette rencontre entre deux voyelles, entre deux sons, crée en quelque sorte, un appel d’air et en même temps une distance marquant une différence radicale.
Ces soirées se veulent emplies de hiatus, de sons, de rire et de tumulte.
Un moulin en kit où l’on voit défiler des pales de 23 à 45 mètres de long, voire 60 mètres et plus et des bruits de mots, des voyelles et des consonnes pour remplir l’air de sons en mouvement.
Le lieu, la voix et la vision seront convoqués dedans et dehors.
Tous les lieux oubliés ou en mémoire, réels ou translucides, les maisons, les champs, les caveaux, les châteaux, les yourts, les précipices, les grottes, les déserts, les auberges, les souterrains, les observatoires…
La voix du lieu, comme le chant des éoliennes, qui vibre jusqu’à nous, viendra peut-être jusqu’à la librairie nous troubler…

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Poeasy

Thomas Clerc

Feu-la-mère

Sabine Macher

Mes jeux et ma grand-mère

Sarah Bahr

StennoS

Joseph Mouton

(no tengo palabras para)

Loreto Martinez Troncoso

(Sans titre)

Anne Lise La Gac, Jeanne Moynot, Pauline Le Boulba
Biographies des artistes

Thomas Clerc

Écrivain et performeur. Son dernier livre, Poeasy, est paru en 2017 aux éditions L’Arbalète/Gallimard.

Sabine Macher

S’adresse aux autres en parlant d’elle. Née en Allemagne de l’ouest, en parallèle d’un travail de danse, elle écrit, traduit et photographie. Livres, lectures et performances depuis 1992. De Ceija Stojka elle a traduit : Je rêve que je vis ? et Nous vivons cachés, parus aux Éd. Isabelle Sauvage, en 2016 et 2018. À paraître : guerre et paix sans je, Éd. Les Petits matins, 2019.

Sarah Bahr

Née en 1986 à Heilbronn (Allemagne), elle poursuit des travaux visuels et poétiques à trajectoires multiples, entre théâtre, performance et écriture. Elle a publié ses textes poétiques dans diverses revues (Nioques, If, Multitudes). Elle est également l’auteur d’Embâcle (Les Petits matins, 2015) et de la pièce de théâtre Décompression Panama ou comment survivre en milieu hostile (compagnie Plateforme Locus Solus, 2018).

Joseph Mouton

Poète, essayiste, critique, il est notamment l’auteur d’un cycle romanesque (mêlant journal, poésie, théorie et critique) intitulé Delenda Ouest : Delenda Ouest, Hannibal tragique suivi de Hannibal domestique aux éditions Les Petits matins.

Loreto Martinez Troncoso

Anne Lise Le Gac

Est installée à Marseille depuis 2014. Entre 2003 et 2008, elle étudie à l’Esad de Strasbourg,elle y pratique la performance et l’installation. Entre 2011 et 2013, elle rejoint la formation Essais au Centre Chorégraphique d’Angers (direction Emmanuelle Huynh). Elle axe la recherche sur l’hypothèse d’une «performance vernaculaire». En 2014, elle est interprète dans la pièce de Claudia Triozzi, Boomerang - Le retour à soi. Recherches et performances se poursuivent en solitaire et sous conversation : Action/tradition/couvercle avec Aymeric Hainaux, performeur beatboxer, Le Cap avec Pauline Le Boulba, Grand mal avec Élie Ortis, artisan couturier. Depuis 2015, elle active Okay Confiance, un festival itinérant de performances.

Jeanne Moynot

Née en 1985, vit et travaille à Pantin. Diplômée de la Villa Arson et des beaux-arts de Nantes. «Performeuse sympathisant avec la peinture, Jeanne Moynot prend le parti de la circulation des formes et des idées. Ces opérations mises en place, temps et espace s’annulent : le passé est convoqué, potentiellement le futur, au profit d’un hyper présent. Le vocabulaire plastique de l’artiste emprunte volontiers à la fête, et particulièrement à ce moment transitoire, entre jubilation et tourment, qui pointe au crépuscule. La figure du monstre, ou du freaks, est convoquée, de son origine à son incarnation la plus spéculative; tous les niveaux de lecture sont autorisés, la surenchère est dans le contenu.» (Tripode). Elle collabore régulièrement avec Anne-Sophie Turion ; ensemble elles créent des spectacles : Bordel (2017), Le poil de la bête (2018). Elles sont accompagnées par Actoral, bureau d’accompagnement d’artistes.

Pauline Le Boulba

Mène une recherche-création au département Danse de l’Université Paris 8 - Vincennes Saint- Denis avec le soutien du Labex Arts H2H intitulée «Performer la critique» sous la direction d’Isabelle Ginot. Ce travail s’appuie sur l’apparition d’une critique performative dans le champ chorégraphique depuis une vingtaine d’années. Dans sa recherche elle expérimente l’analyse d’œuvre comme un espace possible pour relancer un geste, en proposer un autre, performer sa réception. La langue brisée est le titre donné au volet performatif de sa thèse. Composé de trois solos, ce triptyque propose trois réceptions performées, chacune autour d’une pièce chorégraphique (Two discussions of an anterior event de Jennifer Lacey, 2006, Rue de Volmir Cordeiro, 2015 et Dispositifs 3.1 d’Alain Buffard, 2001).